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«L’agriculture Sénégalaise s’est Fortement Redressée» Par Massirin SAVANE, Administrateur du FADSR

Quel bilan des efforts pour développer la production agricole ?
Selon les données fournies par l’ANSD, le secteur agricole contribue à hauteur de 9,4 % au PIB national et pour 62,8% de la valeur ajoutée, e, terme nominal du secteur primaire.
Le secteur agricole est celui qui concentre le plus grand nombre d’acteurs économique du pays. Aussi, après l’arrêt des processus volontaristes d’autonomisation du monde paysan par l’animation rurale suggérée par les travaux du père Lebret, les autorités ont opté pour une politique rigide d’encadrement rural. Malheureusement, cette approche a vite montré ses limites avec les politiques d’ajustement structurel qui ont favorisé la première alternance. La première alternance elle opta plutôt pour la politique de grands programmes tels que la Grande Offensive Agricole pour la Nourriture et l’Abondance (GOANA qui connut son épilogue sans sortir l’agriculture sénégalaise de l’ornière.
Qu’est ce qui a été fait avec Macky Sall ?
Les autorités de la seconde alternance survenue en 2012 ont dès leur installation apportée une innovation de taille en allouant 581 milliards et une feuille de route au Programme d’Accélération de la Cadence de l’Agriculture Sénégalaise (PRACAS), déclinaison agricole au Programme Sénégal Emergent (PSE) qui couvre la période 2014-2035. Ainsi, la Lettre de Politique Agricole Sectorielle élaborée pour la période 2019-2023 poursuivait l’objectif de rendre l’Agriculture Sénégalaise productive, compétitive, diversifiée, pourvoyeuse d’emplois et durable.
Pourtant, le Président Macky SALL a très tôt placé l’agriculture au sens large et le développement du monde rural au centre de ses préoccupations dès la première campagne budget de la campagne agricole a plus que doublé en passant de 40 à 90 milliards entre les campagnes 2021/2022 et 2022/2023 pour atteindre 100 milliards en 2023/2024.
Et les résultats ont été à la hauteur des attentes ?
Les résultats ne se sont pas fait attendre. C’est ainsi que la production arachidière est passée de 527.528 tonnes en 2011/2012 avec un prix producteur de 165 Frs /kg, à 1.050.042 tonnes en 2015/2016, puis à 1 411 000 tonnes en 2017/2018 avec un prix producteur de 210 Frs/kg. En 2021, la production d’arachide a atteint 1 797 486 tonnes soit une hausse de 26% par rapport à la campagne précédente et de 41% par rapport à la moyenne des 5 dernières années. Le prix plancher au producteur a atteint 250 F CFA le kilogramme d’arachide.
Cette production, évaluée à 1 501 498T en 2022, a connu une baisse de 10,51% par rapport à l’année précédente. Elle représente 83,02% par rapport à la cible de 2022 qui était de 1 808 598T.Le prix plancher au producteur a été fixé à 275 F CFA en 2022. Cette baisse s’explique en partie par la volatilité mondiale des cours des engrais ; d’où la nécessité d’avoir nos propres manufactures de production d’intrants agricoles.
La production céréalière totale a été de 1.132.822 tonnes en 2011 pour atteindre 2.152.245 tonnes en 2015/2016, puis à plus de 2 500 000 de tonnes en 2017/2018; en 2022, la production céréalière s’est établie à 3 663 690 tonnes en 2022 contre 3 480 394 tonnes obtenues lors de la campagne précédente soit une hausse de 5,27%. Comparée à la moyenne des quatre dernières années, la production céréalière a enregistré une hausse de presque 15%.
Et pour la production de riz ?
Pour le riz paddy, la production était de 550.000 tonnes en 2011, avec une production de 1015 000 tonnes de riz paddy. En 2022, le niveau de production du riz est estimé à 1 409 120T contre 1 349 7 23 tonnes en 2020 et 1326 720 tonnes en 2021 pour une cible de 1 620 750T soit un taux de réalisation de 86,94% et une hausse de 6,21% par rapport à l’année dernière. Comparé à la moyenne des 4 dernières années, il a connu une hausse de 13%.
La production horticole ?
La production horticole a été de 550.000 tonnes en 2011/2012, pour atteindre 710 000 Tonnes en 2012/2013, puis de 712 100 Tonnes en 2013/2014, ensuite de 876 130 tonnes en 2014/2015, et enfin de 953 3108 Tonnes en 2015/2016.
Cette production, après une tendance haussière ces dernières années, a connu une baisse de 2% passant de 1 583 661tonnes en 2021 à 1 547 280 tonnes en 2022. Cette baisse s’explique partiellement par la mévente de certaines spéculations périssables lors de la campagne précédente. Cela pose les contraintes de stockages.
Au total, pour la période entre 2011 et 2022, la production céréalière est passée de 1 502 517 à 3 663 690 tonnes soit une croissance de 144%. Pendant ce temps, la production d’arachide a augmentée de 30% et celle des fruits et légumes de 128%. Ces résultats ont été rendus possibles par une politique hardie de subvention des intrants et du matériel agricole.
Au total, nous pouvons dire que l’agriculture sénégalaise s’est fortement redressée et que les revenus des producteurs se sont considérablement accrus. Il faut cependant reconnaitre que malgré tous ces efforts le déficit de la balance commerciale des produits agricoles ne s’est pas amélioré ; il s’est détérioré en passant de 308 à environ 335 milliards entre 2014 et 2021. Nous importons 1 300 000 tonnes de riz, 380 000 tonnes de maïs, 700 000 tonnes de blé et même 211 000 tonnes d’huile végétale pour un pays arachidier. Le pays débourse donc, chaque année, 621 milliards en denrées stratégiques.
Pour pallier ces déficits, l’Etat a mis en place la Stratégie de Souveraineté Alimentaire du Sénégal (SAS) qui vise « un secteur primaire, moteur de la relance économique et sociale durable, afin d’atteindre notre souveraineté alimentaire à l’horizon 2028 ». L’objectif est d’assurer aux populations sénégalaises une sécurité alimentaire et nutritionnelle durable, développer une meilleure résilience face aux divers aléas afin d’impulser un développement économique et social, à l’horizon 2035. Nous osons espérer que cette nouvelle stratégie permettra de réduire les gaps qui nous éloignent de la souveraineté alimentaire.
Quelles sont les forces et les faiblesses du secteur agricole
Le Sénégal peut se prévaloir de plusieurs atouts dans le domaine agricole. Selon la FAO (2008), notre pays dispose de 3,8 millions d’ha de terres arables dont plus du tiers est encore en friche. Il s’y ajoute 8,4 millions d’ha de forêts. un potentiel hydrique élevé avec 35 Milliards de m3 essentiellement de surface avec différents cours d’eaux (fleuve Sénégal, Gambie Casamance etc.) et aussi des eaux souterraines dont le niveau de mobilisation se situe aux alentours de 5% presqu’exclusivement réservées à la production d’eau potable pour les populations.
Nous devons obligatoirement réfléchir à récupérer pour réutiliser 10 millions de m3 et 6 millions de m3 perdus chaque jour respectivement par les fleuves Sénégal et Gambie dans l’océan Atlantique. Nous devons revitaliser le canal du Cayor et celui du Baol (régler du coup les contraintes récurrentes d’approvisionnement de Touba en eau) et récupérer toutes ces eaux de ruissellement en transformant les inondations en opportunités pour les cultures de contre-saison.
Au Sénégal, il existe plusieurs zones agro-écologiques et un ensoleillement propices au développement de plusieurs variétés de spéculation. La position géographique du pays proche au continent européen grand importateur de produits de consommation est aussi un atout. Il faut aussi noter que des contraintes majeures et parfois structurelles empêchent l’agriculture Sénégalaise de se développer ; on peut citer entre autres : La non-maitrise de l’eau et l’assujettissement à une pluviométrie capricieuse qui varie au gré du climat en nous maintenant dans un jeu de loterie agricole
La dégradation de la fertilité des sols par des pratiques telles que la monoculture de certaines spéculations et l’utilisation intempestives de matériel agricole non adapté à la fine couche fertile de nos sols tropicaux. Il faut souligner que 67% de nos terres cultivées sont pauvres en matière organique. La petite taille des exploitations familiales plus nombreuses et souvent orientées vers l’autoconsommation avec un accès limité aux facteurs de productions et parfois au conseil.
La forte dépendance des agriculteurs aux subventions agricoles pour les intrants et le matériel agricole. Il faut noter que les subventions telles que pratiquées ne sont pas durables et ne favorisent pas un comportement économique des producteurs. Il faut que le crédit même à taux d’intérêt zéro remplace progressivement les subventions qui à terme ne pourront pas toucher un grand nombre. A côté de ces difficultés majeures, nous pouvons citer d’autres difficultés conjoncturelles telles que les difficultés d’accès à un crédit adapté, un accès limité à des semences de qualité etc.
– Quel serait le rôle des investisseurs sénégalais dans l’essor du secteur
L’Etat doit créer un environnement favorable à l’arrivée d’investisseurs nationaux et étrangers dans le secteur. Il doit favoriser l’avènement de champions nationaux dans l’agriculture qui produiront pour nourrir le Sénégal et pour exporter le surplus. Il faut favoriser l’agrobusiness tout en préservant les terres de la privatisation. Les terres restent dans le domaine national et l’usufruit revient à l’exploitant quelqu’il soit.
Nous devons marcher sur nos deux jambes en soutenant fortement les exploitations familiales pour qu’elles se regroupent dans des cadres tels que le Coopératives. Ces Coopératives pourront s’associer avec les investisseurs dans un partenariat gagnant/gagnant.
En dernier point plus global, quel est votre analyse de l’évolution de l’économie sénégalaise ces dernières années.
Il faut d’abord noter que notre pays depuis plusieurs années, malgré la crise liée à la covid-19 assure une moyenne de croissance au-dessus de 5% grâce au Programme Sénégal Emergent (PSE) qui vise l’émergence en 2035.
En attendant, notre pays reste encore (pour peu de temps ?) un Pays en Développement Importateur Net de Produits Alimentaire (PEDINP). Le secteur Agricole qui emploi les 2/3 de la population économiquement active ne contribue que de manière marginale à la formation du PIB ; cela donne une croissance non inclusive, extravertie pour un pays en voie de développement car tirée par les secteurs des services et de la construction accaparée par la finance internationale et les quelques plus riches. A l’arrivée nous avons un Indice de Développement Humain (IDH, 163ème sur 187) encore faible et un indice de GINI (qui établit niveau d’inégalité de la répartition de richesse) élevé (entre 0,4 et 0,5) pour un pays perpétuellement stable.
A Mon avis, c’est cela qui a poussé les autorités de la seconde alternance à faire de l’inclusion sociale leur cheval de bataille avec la politique des bourses de sécurité familiale et la promotion des politiques d’accès aux infrastructures de base (PUDC, PUMA, Promo ville etc.).
Au demeurant, il faut noter qu’avec le Président Macky SALL on a assisté à une sorte d’interventionnisme de l’Etat qui respecte et même encouragement fortement l’investissement privé (même étranger) mais qui essaie de redistribuer les richesses pour corriger les dysfonctionnements et les fractures sociales et géographiques. C’est un peu cela qui est dénommé économie social et solidaire.
Finalement, il faut noter que nous allons vers l’exploitation de nos hydrocarbures qui feront de notre pays le pays à la plus forte croissance de l’Afrique au sud du Sahara. Nous devons rendre cette croissance inclusive en orientant les flux de ressources vers les secteurs tels que l’agriculture et l’artisanat qui emploient le plus d’acteurs économiques.
Source : BES, le Jour

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